Florès ...

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Les EHPAD, lieux d’habitat et de soins

« L’habitation n’est pas un objet, une machine à habiter : elle est l’Univers que l’homme se construit en imitant la Création exemplaire des dieux, la cosmogonie.» Elliade Mircea, Le Sacré et le Profane. Paris : Éditions Gallimard, 1965, p55

Les EHPAD (Établissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes) sont à la fois lieu de vie et lieu de soin pour leurs résidents. Les personnes âgées rentrent dans les EHPAD alors qu’elles sont de plus en plus âgées et de plus en plus dépendantes. Cette décision est souvent prise à la suite d’une chute de leur état de santé physique ou psychique, de l’inadaptabilité du logement occupé, de l’épuisement de l’aidant…

Comment se sentir chez soi, dans son habitat, alors que l’on arrive dans un nouvel environnement en étant conscient de la perte de ses capacités physiques ? Où l’on reçoit des soins quotidiens et où l’on est dépendant des soignants pour certains gestes de la vie quotidienne ? Comment se sentir chez soi dans un endroit où on aurait souhaité ne pas aller, pour rester, justement, chez soi ?

L’EHPAD doit donc répondre à la fois à des besoins d’habitat et de soin, et ces deux usages doivent être anticipés dès la programmation architecturale du futur bâtiment.

Pluralité d’usages et de besoins

En tant que lieu de soin, les EHPAD, dépendants du Ministère de la Santé, répondent à la fois aux besoins des établissements recevant du public (ERP) et à la fois aux établissements de soin : traçabilité des soins, surveillance médicale, différents circuits pour le propre et le sale, gestion des déchets, largeur des couloirs pour les chariots et lits médicalisés notamment.

EHPAD : lieux de soins ou habitat ?

La perte d’autonomie des résidents implique aussi un mobilier et des espaces qui doivent être adaptés à un public hétérogène en termes de capacités physiques et/ou psychiques. L’EHPAD est aussi un lieu d’habitat collectif, il doit donc répondre à des besoins d’intimité que ce soit pour l’habitat ou pour les soins.

Mais la conception des EHPAD ne doit pas être centrée sur la dépendance de ses futurs résidents, il doit aussi faire en sorte qu’ils s’y sentent chez eux. En effet, le changement peut être rude pour les nouveaux résidents : arrivée rapide suite à une perte d’autonomie soudaine, nouvel environnement, nouveau rythme de vie, prise en charge de beaucoup d’aspects de la vie quotidienne, horaires à respecter, directives à suivre, vie avec des inconnus, soins par des inconnus… Il est donc important que les résidents des EHPAD puissent habiter dans ces lieux et non pas seulement y vivre. C’est-à-dire subvenir à des besoins supérieurs à des besoins primaires : vie sociale, épanouissement, conservation de son identité…).

EHPAD : espaces de travail ou lieux de vie ?

Il ne faut pas oublier qu’en plus d’être des espaces d’habitat et de soin, les EHPAD sont aussi des espaces de travail pour les professionnels. C’est à la fois un lieu de vie dans lequel interviennent des professionnels, et un lieu de travail où vivent des personnes âgées (plus proche d’un hôpital).

Il s’agit de réfléchir aux conflits d’usages entre les résidents et les professionnels, aux liens entre l’habitat et le corps, le territoire personnel de l’individu.

Programmation architecturale d’un EHPAD

La difficulté lors de la conception d’un EHPAD est de prendre en compte les aspects techniques et professionnels du bâtiment tout en veillant au confort comme dans la conception d’un logement.

Les chercheurs Fany Cérèse et Kevin Charras[1], respectivement docteurs en architecture et en psychologie environnementale, définissent ainsi 5 types d’espaces dans les EHPAD qui doivent être pris en compte lors de la conception :

  • Les espaces privés (chambres et salles de bains), qui doivent avoir une frontière claire avec les espaces non intimes (heurtoirs, sonnettes) afin de réguler les comportements, et qui doivent pouvoir être personnalisés. Dans l’idéal, il s’agit d’une maison individuelle au sein du collectif. L’ambiance sensorielle (odeurs, parfums, sons, bruits, luminosité, tactile, température…) et les objets familiers ont un rôle important.
  • Des espaces semi-privés partagés par plusieurs résidents et également les amis et la famille ; proches des chambres, lieux de la vie quotidienne dont les usages sont proches de ceux des salons et salles à manger dans les domiciles. L’aménagement doit pouvoir être personnalisé avec la participation des usagers.
  • Des espaces collectifs / publics, espaces de rencontre, d’information et de socialisation, dont l’aménagement se structure en fonction des usages et des activités. Nous parlions dans cet article de l’importance des jardins dans ce genre de structures.
  • Des espaces professionnels destinés à accueillir des habitants, où le résident devient patient ou client (infirmerie, coiffeur). Ils doivent être séparés des espaces de vie, faciles à trouver et aménagés pour les professionnels.
  • Des espaces uniquement professionnels qui doivent être ergonomiques, confortables et agréables.

Ces espaces peuvent être différenciés par des seuils, des différences d’ambiances, de textures, d’aménagement, de mobilier, d’objets, etc…

Les interactions avec l’extérieur de l’habitat, l’intégration dans la vie du quartier ou du village doivent aussi être réfléchies pour ne pas créer un sentiment d’isolement social des résidents et accentuer l’ancrage local.

Conclusion

Tout l’enjeu derrière la programmation d’un EHPAD est de concevoir un environnement qui est celui d’une institution, mais qui se veut domestique. Lors de la programmation, la concertation est essentielle afin d’adopter les points de vues des résidents et des professionnels afin d’identifier les conflits d’usages et d’atteindre un résultat architecturalement beau et qui sera investi comme habitat par les résidents. Florès y travaille !

C.V.


Sources