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Pour plus de tondeuses à quatre pattes ?

Ce qui ressemblait à une farce il y a peu s’est pourtant développé fortement ces dernières années : grâce à l’éco-pâturage, l’entretien des prairies dans de grands sites, même en ville, est désormais réalisé par des animaux brouteurs… Moutons, chèvres, chevaux, vaches, ânes, lamas, oies, et pourquoi pas ?

L’éco-pâturage en quelques mots

Associant un gestionnaire de site et un éleveur à travers un simple contrat d’entretien, l’éco-pâturage consiste à laisser pâturer, en permanence ou sur des périodes récurrentes, des animaux brouteurs qui assureront le travail de tonte.

En milieu urbain, périurbain ou rural, sur de petites ou de grandes surfaces, sur des terrains en pente ou difficiles d’accès, le recours à l’animal est écologique et permet même d’entretenir des terrains où des machines ne passeraient pas.

Les animaux sont amenés au terrain, au préalable clôturé de manière adaptée et temporaire par l’éleveur qui les laisse en pâture le temps qu’ils effectuent la coupe au propre. Tout cela au rythme des animaux, mais sans carburant (hormis le transport des bêtes d’un site à l’autre), et sans bruit de moteur.

Bêtes à poils, à cornes ou à sabots, de nombreuses options sont proposées par des entreprises spécialisées : des éleveurs qui profitent ainsi de la ressource en nourriture pour leur bétail, offerte grâce à ce service de nettoyage écologique.

Ils proposent généralement des solutions complètes, comprenant la préparation et le barriérage du terrain, la construction d’un abri et le suivi des bêtes, ainsi que les soins vétérinaires ; tout cela sans que le commanditaire n’ait à s’occuper de rien. À la clé, un entretien à faible impact environnemental qui peut s’accompagner d’animations autour de la découverte de l’animal : visites de groupes, tournée à travers la ville, ateliers pédagogiques pour le bonheur des enfants et des adultes…

Malin le mouton, non ?

Dans quels cas est-il pertinent ?

Le recours à des animaux convient particulièrement aux espaces suffisamment importants, enherbés et relativement protégés. On considère en effet que la surface minimale requise se situe autour de 1000 à 1500 m2 d’un seul tenant. Les espaces exigus ou nécessitant une traversée ainsi que les zones polluées sont écartés, de même que les zones de plantations non protégées qui finiraient assurément dans les estomacs gourmands. Mais partout ailleurs, c’est possible !

Sur des terrains enfrîchés, un pâturage intensif permet de rouvrir des clairières et de nettoyer efficacement les plantes adventices, si tant est que les ligneux et les ronces n’ont pas pris le dessus. Outre le broutage, le piétinement de bêtes nombreuses – on parle alors de surpâturage – permet de redonner un horizon satisfaisant à des terrains très embroussaillés.

Sur les talus, les bassins de rétention d’eau, les grandes pelouses accidentées, les animaux assurent sans effort une tonte rase et régulière lorsque la tonte mécanique demande au contraire beaucoup d’énergie, de bruit et de pollution.

Enfin, sur les grandes pelouses, les grands terre-pleins ou les prés, installer des animaux est idéal et une joie pour les riverains et les visiteurs, enfants en tête.

Quels intérêts ?

Parmi les maîtres d’ouvrage conquis, des sociétés d’autoroute, des sites industriels, parcs solaires, maisons de retraite, écoles, collectivités et offices de logements sociaux, et même des hôpitaux en ont fait l’expérience réussie.

Faire appel à l’animal, et à la femme ou à l’homme qui l’accompagne, c’est avant tout faire preuve d’une démarche sociale et écologique en faveur d’une moindre énergie dépensée et de la valorisation de savoir-faire traditionnels.

1. L’enrichissement en biodiversité

L’enrichissement en biodiversité peut également être un facteur déterminant : par l’apport d’excréments, les animaux contribuent à enrichir les prairies quand la tonte et l’évacuation des déchets verts auront tendance à les appauvrir. La matière organique est maintenue sur site et provoque une aggradation des biotopes par la multiplication progressive des cortèges végétaux et animaux des prairies pâturées. Associée à une gestion différenciée, la gestion pastorale contribue ainsi au développement des plantes fleuries, donc des insectes pollinisateurs et des oiseaux granivores et insectivores… Papillons, abeilles et libellules s’invitent à la fête, ainsi que mésanges, chardonnerets et passereaux variés !

2. Réduction des espèces envahissantes

Autre atout, le recours au pastoralisme est efficace pour réduire l’étendue des espèces envahissantes, telles que la renouée du Japon (avec les chèvres), que le broyage mécanique a plutôt tendance à renforcer.

3. Rencontres et échanges

Enfin, la présence de l’animal, en particulier en ville où on le croise peu, est invariablement source de rencontres et d’échanges. Les initiatives de pastoralisme urbain sont en effet le support d’actions collectives fortes et fédératrices à travers les âges et les milieux sociaux : quel manège incongru d’assister à une transhumance à travers les grands ensembles ou l’hôpital !

Innover en invitant des usages traditionnels renvoyant plutôt à l’imaginaire rural, voilà une belle occasion de reconsidérer sous un autre angle le cadre de vie et la nature dans la ville…

Combien ça coûte ?

L’éco-pâturage peut être une solution particulièrement compétitive, bien que le coût varie selon la configuration du site et la surface à entretenir. On évoque généralement des prix autour de 1€/m2 par an pour de petites surfaces (moins de 2000 m2), mais ils peuvent descendre à moins de 10 centimes/m2 par an sur de grands sites (au-delà d’un hectare).

Sur des surfaces ne nécessitant pas un degré de finition très élevé, l’éco-pâturage peut s’avérer particulièrement intéressant par rapport à une entreprise d’entretien d’espaces verts conventionnelle, pour laquelle on compte entre 10 et 50 centimes/m2 et par tonte.

Quelles sont les règles pour que ça marche ?

Parmi les nombreux retours d’expérience, le bilan est généralement très positif, et peu de difficultés sont vraisemblablement rencontrées.

Rencontre avec les voisins

L’accueil par les riverains est le plus souvent bienveillant puisqu’ils voient dans la présence animale une animation inattendue et universelle. Les dégradations ou actes de vandalisme demeurent en effet des cas rares.

Le problème principalement rencontré concerne le nourrissage des animaux : l’apport de pain sec en particulier pour certains ruminants – bien qu’ils en raffolent – peut malheureusement leur être fatal. Un accompagnement pédagogique est donc impératif, par de l’affichage, de la sensibilisation en direct par l’éleveur, voire la mise à disposition de bacs de récupération du pain sec pour d’autres animaux à qui il conviendra mieux (cochons ou volailles).

Une tonte vivante

Il est important de considérer les interventions d’éco-pâturage comme des prestations mobilisant des êtres vivants, qui discernent les espèces qu’ils peuvent manger et celles qui peuvent leur être néfastes. Il arrive ainsi que des rebuts persistent (fougères, joncs, ajoncs, genêts, prêles, ronces…), et appellent à un passage mécanique complémentaire.

Enfin, la hauteur de coupe se situe autour de 10 à 15 cm, très bénéfique pour la biodiversité, moins pour les séances de practice qui demandent un green taillé au millimètre… mais l’aménagement des golfs est un tout autre sujet !

On le voit, nombreux sont les atouts pour la mise en œuvre d’une gestion pastorale des grands espaces, bénéficiant de vertus écologiques, sociales et d’un coût très compétitif. Alors, les moutons sur la place, à qui le tour ?

N.J.