Florès ...

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Matériaux d’architecture… où se cache la complexité ?

 

Un même projet peut combiner allègrement l’usage multimillénaire du chaume en toiture et l’utilisation de récupérateurs de chaleur high-tech. Ces nouveautés cachent une complexité réelle qui n’est pas tout-à-fait neutre pour le programmiste…

Nous assistons à une double tendance :

  • au retour en force de matériaux et procédés anciens : leur bilan environnemental est en général bon et ils présentent des caractéristiques intéressantes d’isolation ou d’inertie,
  • à l’usage de techniques ou matériaux innovants, souvent intégrés à des formes plus traditionnelles…

Le retour des matériaux anciens est frappant. Ils n’avaient jamais totalement disparus. La nouveauté réside dans la banalisation de leur usage. Ils sortent de la sphère vernaculaire ou pittoresque pour accéder à une pleine reconnaissance :

les très sérieux Cahiers Techniques du Bâtiment titraient leur numéro de décembre « Chaume une technique à redécouvrir » – Inimaginable – sans rire – il y a quinze ans !

Si la couverture en chaume n’est pas encore dotée d’un DTU, les règles professionnelles pour les constructions en paille sont en cours de mise au point. Les bardeaux de châtaignier fendus ont refait leur apparition…

Les matériaux populaires anciens sont ainsi redevenus d’usage quasi-courant par l’effet combiné de trois facteurs nouveaux :

  • la possibilité de les modéliser,
  • une pensée globale coût/efficience énergétique et environnementale,
  • une capacité à adapter la mise en œuvre et prévenir les pathologies (interface entre matériaux).

A l’autre bout du fil de l’histoire, le high-tech est désormais intégré à l’acte de construire… Les matériaux à changement de phase adoptent un comportement similaire à de l’inertie thermique. Le photovoltaïque est un exemple parlant de technologie de laboratoire s’invitant dans toutes les formes de parois : tuiles, membranes d’étanchéité ou films équipant stores et vitrages.
L’usage de nano-particules permet de stimuler les performances d’autres matériaux : amélioration du rendement de capteurs solaires, LED dopées aux nano-cristaux, amélioration de la résistance mécanique et même propriétés autonettoyantes ou bactéricides…

Pour autant ces matériaux très innovants ne sont pas les plus visibles et leur marketing est souvent fondé sur leur simplicité de mise en œuvre, somme toute similaires à celle des produits traditionnels.

Si l’innovation se fait discrète, les matériaux anciens s’affichent. Mais ils ne sont pas le fruit d’une mode. Leur utilisation correspond à une nouvelle perception du monde – vécu comme fini, et à la déroute du mythe du Progrès. Ils sont associés un peu vite à une recherche de simplicité. Disons plutôt que la complexité s’est déplacée. En réalité la sophistication est réelle : elle réside plus que jamais dans la conception, mais aussi le suivi du fonctionnement de l’ouvrage.

Et c’est là – parfois – que le bât blesse.

Les principes bioclimatiques ne dispensent pas de systèmes de régulation. Les attentes de sécurité et de sûreté, mais aussi le souci d’optimiser certaines consommations conduisent à installer des systèmes que des logiciels gèrent intelligemment.
La GTB centralise de plus en plus de fonctions jadis séparées et qui elles-mêmes sont de plus en plus imbriquées. Et force est de constater que les utilisateurs – dans toute leur diversité – ne parviennent pas aisément à s’approprier les outils de suivi du fonctionnement des systèmes gestion technique du bâtiment (GTB).

Lorsqu’une formation leur est prodiguée à l’occasion de la mise en service, ce savoir-faire survit rarement aux changements de personnes, c’est-à-dire au mieux quelques années.

L’usage d’un bâtiment doit rester simple, mais il intègre à présent un nouvel aspect : immatériel.
Ce n’est plus de la prospective. C’est une réalité quotidienne, mais elle est négligée ou ignorée.

Que doit faire le programmiste de ce constat ?

Il pourrait contribuer à penser la relation entre cette nouvelle complexité et chaque utilisateur. C’est-à-dire investir le champ du cahier des charges fonctionnel des GTB. L’enjeu est de parvenir à prescrire des niveaux des services et d’ergonomie adaptés aux différents types d’utilisateurs : usagers ou habitants, personnels, services de maintenance, mainteneurs spécialisés… Ils peuvent être nombreux !

Loin des techniques de mise en œuvre, le problème que pose la nouvelle complexité de l’architecture n’est ainsi pas forcément là où on la cherche. Il est plutôt dans les interfaces multiples d’un seul et même système avec les diverses familles d’utilisateurs.
En réponse, on pourrait parler de Haute Qualité d’Usage ou d’ergonomie de logiciels, et surtout d’intuitivité. De ce point de vue, l’apport de l’ « internet des machines » ainsi que celui des nouveaux supports d’information que représentent les tablettes ne seront probablement pas négligeables.

Mais en amont de ces solutions, la problématique n’est pas technique mais fonctionnelle.

C’est parce que le programmiste est au contact de chacun des utilisateurs d’un bâtiment et qu’il est au cœur de l’analyse des usages, qu’il est bien placé pour apporter une contribution utile à cette réflexion.

O.T.