Construction modulaire, construction hors-site, préfabrication… Ces mots reviennent fréquemment au cours de nos études et des échanges avec les maîtres d’ouvrage, sans pour autant que les notions qu’ils sous-tendent ne semblent bien claires. En juin dernier, une partie de la Team Florès a saisi l’opportunité et s’est rendue à Paris pour suivre une formation sur le sujet. On vous propose aujourd’hui de mieux cerner ces notions et les enjeux qui en découlent, pour y faire appel dans vos projets.
Pour commencer, un peu de terminologie !
La construction modulaire
La construction modulaire consiste à avoir recours à des éléments standardisés, en 2 ou 3 dimensions. Généralement fabriqués en atelier, ces éléments permettent de construire un bâtiment ou une partie d’un bâtiment. Ils sont alors dénommés modules. Dès lors, la notion de construction modulaire fait nécessairement appel à la celles de préfabrication, de normalisation et d’industrialisation.
La préfabrication
La préfabrication consiste à fabriquer des éléments ou modules en amont du chantier, le plus souvent en atelier ou en usine. Cette préfabrication peut être artisanale (fabrication d’une charpente bois préassemblée en atelier puis démontée avant d’être mise en place sur le chantier). Elle peut aussi être industrialisée, avec une production en série d’éléments normalisés et standardisés. La notion d’industrialisation et de normalisation s’oppose à celle du prototypage, qui consiste à repartir de zéro pour chaque nouvel élément à produire.
Pour résumer, la construction modulaire appelle nécessairement à la préfabrication, mais pas toujours à l’industrialisation.
Un rapide historique de la construction modulaire
La construction modulaire se présente en opposition à la construction traditionnelle (où chaque construction est unique, de l’ordre du prototype) dès la période d’Après-Guerre, durant laquelle les enjeux de la reconstruction sont rapidité et limitation des coûts. Il est alors question de s’appuyer sur des éléments rationalisés et fabriqués en atelier, de manière standardisée, pour accroître l’efficience de la reconstruction du parc immobilier.
Dès 1955, cette démarche est appliquée à des modules habitables en trois dimensions par un industriel français. Les constructions modulaires servent alors à produire de l’habitat de cantonnement. Les modules seront très vite standardisés sur la base d’un gabarit routier afin d’être facilement déplacés.
Aujourd’hui, les constructions modulaires sont employées pour des usages très divers : base vie de chantier, bureaux, salles de classes ou encore logements. Le tout, de manière temporaire ou pérenne, ou encore sous forme de modules techniques ou de structure.
La construction modulaire, plus rapide ?
Oui, c’est indéniable. La construction modulaire permet, grâce à la fabrication hors-site de toute ou partie des éléments, de réduire la durée du chantier. Cela permet notamment de réaliser les travaux de terrassements et de fondations parallèlement à la production des modules. Quel que soit le type de module (2D, 3D, etc.), l’assemblage sur chantier est nettement plus rapide que la construction traditionnelle d’un bâtiment réalisée in-situ.
De plus, réduire le temps de réalisation sur chantier permet de s’affranchir des retards dus aux intempéries et de limiter les nuisances du chantier sur les riverains ou les occupants. Par exemple, au cours des derniers mois, plusieurs pays ont eu recours à la construction modulaire pour déployer de nouveaux services hospitaliers, en un temps record.
La construction modulaire, plus qualitative et plus performante ?
Oui et non. Cela dépend de nombreux paramètres. La préfabrication des modules en atelier garantie aux ouvriers des conditions de travail plus stables et plus favorables à une exécution de qualité, que sur le chantier en lui-même.
L’assurance d’une qualité plus élevée est également favorisée par des études plus abouties en amont de la réalisation. Aussi, celle-ci est favorisée par le recours à des opérateurs formés à des tâches précises, contrairement aux compagnons qui doivent faire face à un large panel de situations sur un chantier donné.
Le fait de ne pas être exposé aux intempéries lors de la préfabrication permet d’assurer l’intégrité des matériaux et la qualité de leur mise en œuvre. On pense ici aux isolants et différentes membres pare-vapeur ou d’étanchéité à l’air. Il faut toutefois nuancer le propos : préfabrication ou non, des matériaux de mauvaise qualité ou peu performants le resteront.
La construction modulaire, moins chère ?
Le coût de la construction modulaire est l’un des sujets qui revient fréquemment sur la table. Cependant, il n’existe pas de vérité générale sur ce sujet. Le coût de la construction modulaire dépendra de plusieurs paramètres :
- niveau de qualité et matériaux souhaités,
- niveau de performance exigé (étanchéité à l’air, performance thermique),
- nombre et types de modules,
- usage pérenne ou temporaire, etc.
Le principal vecteur d’économie pour la construction modulaire réside sans doute dans l’économie d’échelle liée à l’industrialisation de la production de modules d’un certain type. En effet, pour qu’un projet en construction modulaire présente un net avantage financier, il s’agira de limiter au minimum les différents types de modules souhaités, et de faire appel à un nombre important d’exemplaires de modules retenus. Bien souvent, l’économie d’échelle n’est atteignable que pour des projets multi sites de grande envergure.
La construction modulaire, un risque de standardisation et d’uniformisation ?
Encore une fois, oui et non. D’un point de vue architectural, le risque est bien réel et on peut même considérer qu’il s’est concrétisé. Il n’y a qu’à regarder certains lotissements où les maisons sont toutes identiques, issues du même catalogue de constructeur, ou bien certains immeubles de bureaux dans des quartiers d’affaires.
Cependant, dans ce cas, la faute repose plus sur l’industrialisation de la construction que sur sa modularité. La construction modulaire offre un panel de possibilités quasiment infini en permettant de recourir à tous types de matériaux (structure bois, métal, béton…) et tous types de modules (éléments de construction, locaux standardisés, modules techniques, etc.). Tout est question d’appropriation de la démarche par les concepteurs, en fonction des enjeux et contraintes de chaque projet. Le recours à la construction modulaire peut même devenir un prétexte à la créativité et à l’innovation.
La construction modulaire, que pour le neuf ?
Il s’agit sans doute d’une idée reçue. La construction modulaire permet une infinité d’approches, avec différents types de modules.
Si elle semble parfaitement se prêter à la construction neuve, à partir de modules 3D (logements complets, chambres d’hôpital, etc) ou même 2D (planchers et murs en CLT par exemple), la construction modulaire présente de gros atouts pour relever le défi de la réhabilitation.
C’est notamment le cas pour les opérations dont le planning est contraint ou devant être réalisées en site occupé. Le recours à des modules préfabriqués permet alors de condenser la durée de chantier, d’en diminuer les nuisances et de répondre à certains enjeux techniques.
La construction modulaire a de nombreux atouts
La construction modulaire, bien qu’elle ne soit pas ancrée de manière profonde dans la culture constructive française – comme cela peut être le cas chez les anglo-saxons, gagne à être mieux connue des acteurs de la construction. Elle présente un potentiel d’innovation et de nombreux avantages, en construction neuve comme en réhabilitation, sans restreindre le champ des possibles. Florès a eu l’opportunité de mener des réflexions avec la construction modulaire au cours de plusieurs projets comme la réhabilitation de la résidence universitaire La Métare à Saint-Etienne pour le Crous de Lyon (façades et salles de bain préfabriquées) ou pour la construction de logements déplaçables dans toute la France pour Alliade Habitat.
J.P.
