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Des revendications à juste titre : récit d’une immersion en Guyane

Des revendications à juste titre : récit d’une immersion en Guyane

Ce n’est pas tous les jours que nos missions de programmistes nous envoient à l’autre bout de l’Atlantique… Mais, s’agissant d’une consultation de l’Université de Guyane (sur l’évolution du schéma directeur dont l’une d’entre nous avait rédigé la première version il y a vingt ans), nous ne pouvions pas passer à côté ! Nous vous racontons cette immersion en Guyane pour nos deux collaboratrices.

Des enjeux de taille

L’enjeu d’un schéma directeur universitaire n’est pas des moindres. Il s’agit en effet d’identifier le besoin en construction et aménagements sur les dix prochaines années. Notre plan d’action pour y parvenir ? Réaliser un diagnostic des campus de l’Université de Guyane et de rencontrer un maximum d’acteurs du projet.

Nous avons donc pu rencontrer tour à tour usagers et décideurs : enseignants, étudiants, techniciens, collectivité, ARS, rectorat ou encore préfecture… Des rencontres qui nous ont passionnées, et nous ont permis de mieux appréhender le contexte si particulier des Outre-mer.

Le ressenti Florès

Je suis bien consciente qu’il me sera impossible d’être exhaustive. Mais je tenais tout de même à partager quelques ressentis et apprentissages sur ce département passionnant dont on parle trop peu. Ce, à mon humble échelle, toujours.

Un statut délicat

Ce n’est un secret pour personne : le statut des Outre-Mer est loin d’être évident. L’histoire a créé une dépendance entre la Guyane et la France métropolitaine. Dépendance dont les résultats sont de plus en plus visibles. Notamment la nécessité de faire appel à une main d’œuvre délocalisée sur place, généralement pour des durées de 2 à 3 ans. Ce qui freine l’investissement et accentue les disparités entre locaux et métropolitains. Dans ce cadre, le développement de l’Université de Guyane, à la fois pour diversifier son offre et la rendre plus accessible aux guyanais, est un enjeu clé !

Une terre à la fois en Amérique du Sud et en Europe

En Guyane, on est en Amérique du Sud… Et en Europe à la fois. Cette situation très particulière, propre aux départements d’Outre-Mer, lui confère des problématiques similaires à celles que pourrait rencontrer une île (coût de la vie plus élevé, isolement).

À l’échelle de notre étude, cela se traduisait par des coût travaux peu comparables à ceux de France métropolitaine, mais aussi un coût en maintenance nettement supérieur (avec la nécessité, la plupart du temps, de faire venir la main d’œuvre et les pièces de métropole !). Et forcément, qui dit Amérique du Sud dit autres spécificités. Comme par exemple un climat équatorial impactant la longévité du bâti et des installations techniques (et réhaussant encore le coût de maintenance…).

Une terre de diversité culturelle

La Guyane est une terre de diversité culturelle. On y dénombre une quarantaine de langues, dont une douzaine officialisées. Sur un territoire de seulement 83 hectares (comparable, pour idée, à celui de l’Autriche) incluant 34 hectares de forêt amazonienne, ce n’est pas rien ! En plus du français, on retrouve des langues amérindiennes, des langues créoles à bases lexicales françaises, portugaises ou anglaises, des langues européennes liées à l’occupation des pays voisins (portugais, néerlandais, anglais, espagnol), ou encore des langues asiatiques (comme le mandarin ou le hmong, lié aux populations laotiennes arrivées dans les années 70).

Cette richesse culturelle est une chance, mais engendre d’autres problématiques quant à l’accès aux études supérieures dans certaines régions, avec de fortes disparités entre l’Ouest et l’Est du département. Un combat pour l’égalité des chances que l’Université de Guyane s’efforce de mener depuis sa création.

Un manque d’infrastructures

La Guyane souffre d’un manque criant d’infrastructures. Difficile de se dire que l’on est en France quand on voit qu’à Cayenne même, il est impossible de compter sur les transports en commun. En effet, les bus existent mais sont trop peu fiables pour constituer une réelle alternative à la voiture. Bien évidemment, pas de train non plus. Quant aux routes, elles ne sont pas si nombreuses et parfois en piètre état.

Les difficultés quotidiennes dont nous ont fait part les étudiants et leurs encadrants nous ont marquées : des trajets depuis les communes voisines dans des bus souvent trop pleins, nécessitant de se lever à 4 heures du matin pour un retour tard le soir… Inutile de préciser que dans ce cadre, persévérer dans ses études est un vrai combat. Qui se répercute alors sur un fort taux de décrochage scolaire. D’ailleurs, si de nombreux étudiants viennent de communes voisines, ce n’est pas seulement parce que le coût de la vie leur impose de vivre auprès de leurs familles : les logements étudiants manquent cruellement à Cayenne.

En route pour le développement universitaire

Nous retrouver face à de tels constats nous a révoltées, mais également motivées à structurer au mieux le développement universitaire sur place. Il faut dire que l’Université de Guyane est encore jeune. Avant, elle était fusionnée en une seule entité, l’Université Antilles-Guyane. Une séparation qui était attendue depuis longtemps, pour une meilleure prise en compte des spécificités de chacun de ces territoires et un développement adapté à l’échelle de la Guyane.

Le schéma directeur formalisant les besoins récoltés in situ en un document officiel à destination de l’Etat, nous avons tout fait pour y retranscrire la parole des usagers, des acteurs et des décideurs locaux. En tête de liste, la construction de bâtiments dédiés aux filières médicales (pour former des médecins et infirmiers locaux et ainsi améliorer l’accès aux soins), ainsi que l’aménagement d’un bâtiment dédié à la vie étudiante, intégrant un complexe sportif, des espaces de travail et de repos (d’autant plus importants au vu des longues journées des étudiants sur place).

Et après ?

La suite n’est plus entre nos mains, mais nous avons bon espoir : de nombreuses aides financières existent et pourront être sollicitées via le schéma directeur. Reste à espérer que les ressources humaines soient suffisantes pour mener à bien ces projets construits. En attendant, je ne peux que vous inciter à vous intéresser à la Guyane, à l’histoire de ce petit paradis à la diversité incroyable où règne une nature encore sauvage…

J.R.