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La construction en terre coulée : c’est possible !

La terre crue est un matériau de construction de qualité dont l’utilisation, bien qu’encore peu fréquente, se développe dans nos sociétés. Des recherches sont actuellement menées afin de développer un béton de terre coulée, et plusieurs projets ont déjà éprouvé cette méthode innovante ! Nous vous présentons ici les étapes clefs pour mener à bien un projet en béton de terre coulée.

Ce matériau présente de nombreux avantages et les méthodes de mise en œuvre sont nombreuses, comme nous l’avions expliqué dans cet article. Les procédés constructifs classiques et éprouvés pour la terre crue (pisé, adobe…) ont pour principal inconvénient une durée de mise en œuvre élevée. Mais des solutions peuvent exister pour construire en terre et réduire les durées de mise en œuvre.

La constitution du béton

Un des intérêts de mener un projet de construction en terre est de pouvoir utiliser le gisement local et de limiter ainsi l’énergie grise liée à la construction (réduction des distances parcourues). La constitution du béton de terre coulable doit être adaptée à chaque projet et à chaque gisement de matière première. En effet, la terre n’a pas la même constitution d’un endroit à un autre…

La première étape, lorsque l’on souhaite mener à bien un projet utilisant du béton de terre coulable, est donc d’analyser la constitution de la terre utilisée. La composition du béton est ensuite déterminée en fonction de la qualité de la terre et de l’usage souhaité (cloison, mur porteur…), en menant des essais sur sa résistance. Le béton de terre peut par exemple avoir la composition suivante (exemple d’un projet mené à Saint-Clair-de-la-Tour, Isère) :

  • 28 % de terre du site
  • 64 % de sable à béton (contenant des granulats) provenant d’une carrière située à proximité du site
  • 7 % de ciment

L’ajout de sables à la terre dépend de la quantité de granulats présente dans la terre utilisée. La quantité de ciment est en général de l’ordre de 4 à 8 %, alors que dans un béton conventionnel elle est d’environ 15 %. Par contre, l’épaisseur d’un mur en béton de terre est souvent plus importante que celle d’un mur en béton classique, afin d’offrir une résistance suffisante. Des recherches sont menées et des essais réalisés pour limiter l’usage de ciment et favoriser l’usage de liants à moindre impact environnemental (fines argilo-calcaires, biopolymères, chaux…)

Système constructif

Une fois la constitution du béton déterminée, le mélange est réalisé dans une centrale à béton, sur site ou ailleurs, de préférence à proximité, toujours dans un souci de réduction des impacts environnementaux. Le mélange doit être suffisamment humide et fluide pour pouvoir être coulé.

Le mélange est ensuite coulé à l’état visqueux, voire liquide, dans des coffrages, puis vibré. Le principe de mise en œuvre est identique à celui utilisé pour le béton coulé conventionnel. Ce procédé est donc plus rapide que le pisé, où la terre est versée humide puis compactée par couches successives.

terre coulée

Mise en place du coffrage

terre coulée

Béton de terre coulé dans le coffrage

La spécificité d’un projet en béton de terre par rapport au béton armé est le temps de séchage et de décoffrage, qui est supérieur. En effet, pour garantir un séchage suffisant et une résistance adaptée du mur, le béton de terre nécessite d’être décoffré environ après 4 jours, contre 2 jours pour le béton armé. Le mur demande ensuite un minimum de 7 jours supplémentaires de cure afin de garantir l’atteinte de la résistance attendue. Plus la cure du béton est longue, plus le matériau aura de bonnes résistances mécaniques. Pour le béton armé il est recommandé une cure de 1 à 15 jours.

terre coulée

Décoffrage

Ces images sont issues du film Construire en terre crue – Terre coulée
Licence Creative Commons amàco et Les films du lierre

L’entretien d’un ouvrage en béton de terre doit être régulier (comme pour tout ouvrage). Il s’agit essentiellement de l’entretien des enduits extérieurs tous les 3 – 4 ans environ, suivant les conditions climatiques et les matériaux mis en œuvre en enduit. Il faut également veiller au bon écoulement des eaux de pluie et de ruissellement. Lors de la conception, une attention particulière doit être portée à la protection des murs en terre au niveau du sol, par exemple par la mise en place d’arase en béton de 30 cm de hauteur (protection de l’usage du bâtiment).

Cette technique de construction ne fait actuellement l’objet d’aucune règle professionnelle ou certification. Le maître d’ouvrage est donc obligé de passer par la mise en œuvre d’une Appréciation Technique d’Expérimentation (ATEX) délivrée par le CSTB pour pouvoir bénéficier d’une garantie décennale. Cette démarche a déjà été effectuée sur différents projets, avec succès.

En ce qui concerne le coût, un mur en terre coulée de 30 cm d’épaisseur revient à environ 250 €/m², soit à peu près 20 % plus cher que le béton banché. Cependant, ces deux procédés constructifs ne peuvent pas être comparés seulement sur la base du prix, mais en prenant en compte l’intégralité du cycle de vie des matériaux. Par comparaison, le coût d’un mur en pisé de 50 cm d’épaisseur est de l’ordre de 600 €/m².

Le béton de terre présente donc les avantages d’utiliser une ressource locale et d’utiliser un procédé de mise en œuvre similaire à celui du béton classique, connu et éprouvé. Bien que cette technique ne soit pas encore certifiée, il est possible de mener un projet de construction utilisant du béton de terre coulée et de bénéficier d’une assurance pour l’ouvrage. En termes de coût, un mur en béton de terre revient plus cher qu’un mur en béton armé, mais ce coût est à mettre en regard des gains obtenus sur les impacts environnementaux.

L.P.