On pourrait imaginer que le programmiste, qui agit avant la conception, est peu concerné par l’arrivée du BIM… erreur ! Le programme est la première donnée à rentrer dans la base que constitue le BIM… Il a donc intérêt à être BIM-compatible! Décryptage.
Dessine-moi un BIM…
Le BIM, associant une base de données à des d’éléments 3D de construction, semble pouvoir s’adapter à toutes les phases de la conception, de la réalisation et de l’exploitation d’un bâtiment. Il suffit d’associer les informations pertinentes à chaque composant du clone numérique de l’ouvrage, puis de les exploiter. Le principe est simple, en revanche, il suppose d’énormes moyens de calcul.
La nature et la qualité des informations associées au modèle 3D permettent une précision inégalée dans des domaines aussi variés que l’estimation des coûts des travaux ou la prévision du comportement thermique. Le chantier lui-même pourrait être révolutionné par ce boom du BIM : meilleure anticipation du phasage, de l’organisation et de l’installation de chantier jusque dans l’anticipation des interactions entre lots techniques !
En bout de chaine, le jumelage du modèle numérique du bâtiment à un système de gestion de la maintenance et de l’exploitation ouvre des possibilités inouïes, et permettra aussi de fiabiliser les approches en coût global.
Ces avantages sont parfaitement mis en avant par de nombreux articles et ouvrages ici et là, et aussi par l’Etat, qui voit dans ce système une promesse de réduction des coûts de construction pouvant aller jusqu’à 20%.
Le BIM, c’est d’abord un support de travail collaboratif
Il est essentiel de comprendre que le modèle numérique se construit certes par étape, mais en intégrant d’emblée une définition plus large et complète. Il associe dans le même fichier la conception architecturale et technique. Il induit ainsi un travail plus collaboratif entre architectes et bureaux d’études que permettent les réplications informatiques à distance.
Dès lors que plusieurs acteurs peuvent intervenir sur un même objet, la question de la gestion des droits en modification du modèle se pose inévitablement. Cela suppose une charte et un périmètre d’intervention pour chacun. Cela induit aussi la nécessité d’un arbitre et d’un animateur de la démarche tout au long du projet.
On assiste à la naissance d’un nouveau métier : le BIM Manager.
Il est aussi à même d’assurer la transmission du modèle au gestionnaire de l’ouvrage… De ce point de vue, il aura fort à faire… combien de maîtres d’ouvrage ont les moyens de gérer un tel système, alors même que beaucoup de plans et bien des DOE s’égarent prématurément ?
Mais, bien loin de ces questions impertinentes, en amont, qu’en est-il, du point du vue du programmiste?
Pour un programme importable en un clic
Le processus de conception est changé : il est moins séquentiel et davantage parallèle. C’est ainsi l’ensemble des données du programme architectural et technique qui est pris en compte dès les phases précoces de conception. Le programme technique devient central : il devra être plus précis que jamais.
Par ailleurs, le BIM permet de penser le plein, les composants, mais aussi le vide: chaque espace peut être défini comme une entité à part entière, dotée de caractéristiques ou de performances à atteindre… On est alors au cœur du programme architectural. Mais cela suppose qu’il puisse être exporté dans son intégralité vers cette base de données.
Vers un programme numérique BIM-compatible
Le programme technique, architectural et fonctionnel devra ainsi avoir une existence numérique compatible avec le format de base de données.
Il s’agit d’inventer un nouveau type de support, de format et de présentation de l’information du programme.
Les fiches descriptives des espaces, par exemple, devront pouvoir être exportées en format tableur avec toutes leurs informations quant aux proximités et liaisons nécessaires, usages, performances techniques, ambiances…
Le programmiste dans la matrice
La compatibilité du programme avec ce nouvel outil aura une autre vertu, celle d’établir un dialogue plus nourri entre programmistes, architectes et bureaux d’études. En effet, le programmiste, doté d’un accès en lecture au modèle, pourra en temps réel vérifier plus facilement la bonne prise en compte du programme et de ses priorités dans le projet.
Le BIM bouleversera-t-il le métier de programmiste? Pas évident, mais il l’enrichira de nouvelles pratiques.
Le programme, qui s’adresse avant tout à des lecteurs, continuera probablement d’avoir une version traditionnelle, mais il se doublera à coup sûr d’une existence numérique d’un nouveau type dont le format est à inventer.
Voilà un chantier passionnant pour nous tous !
(OT)