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La pierre sèche, un vieux truc à oublier ?

A première vue, la pierre sèche ne correspond pas aux canons actuels d’un matériau d’architecture : pas étanche, demandant des épaisseurs significatives, exigeant une main-d’œuvre importante et qualifiée. Trois constats qui pourraient définitivement enterrer la pierre sèche !

Et pourtant, elle connaît un certain renouveau… pourquoi ?

La pierre sèche, c’est d’abord une technique, un savoir-faire : l’art d’agencer des pierres sans liant afin de construire des parois.Cet art repose sur des principes simples de stabilité – chaque pierre doit être stable, lorsqu’elle est posée – mais exige pour aboutir à un ouvrage de qualité une rigueur de chaque instant.

Pour comprendre comment mettre en œuvre ce matériau, des associations comme ABPS proposent des formations.Des professionnels convaincus ont établi un guide des bonnes pratiques avec le CAPEB. Victoire ! Des règles professionnelles sont en cours d’édition par l’Agence Qualité Construction, ce qui permettra enfin la reconnaissance du matériau par les assureurs… d’accord, mais pour faire quoi ?

Les murs de soutènement…

C’est LE domaine où la pierre sèche est imbattable !

Savez-vous que la forte perméabilité du mur (il y a autant de trous que de pierres) limite la pression exercée par l’eau du sol, en la divisant par un facteur 3 à 4, par rapport à un mur maçonné étanche ou mal drainé ?

En effet, un mur ordinaire, drainé de manière ponctuelle par les trous que vous remarquerez en partie basse, voit son dispositif de drainage se colmater en quelques dizaines d’années seulement. Un mur en pierre sèche, lui, se colmate en plusieurs siècles.

Disons aussi qu’en cas de tassement différentiel des sols, il encaisse les déformations sans présenter les horribles fissures souvent visibles sur des murs en béton peu ou mal armé.

C’est costaud et pas si cher !

On estime ainsi à 400 ans la durée de vie d’un mur de pierre sèche bien construit… délai au-delà duquel le colmatage des anfractuosités rend le mur étanche et conduit alors souvent à la rupture.

Du point de vue économique, la construction de murs de soutènement en pierre sèche est concurrentielle : une répartition des coûts à l’opposé de celle des murs maçonnés (peu ou pas d’engins, matériaux économiques et souvent recyclés mais une main-d’œuvre importante) conduit à un total similaire.

Un atout pour le paysage et l’environnement

Le mur en pierre sèche était déjà attesté en gaule méridionale avant l’invasion romaine. Autant dire qu’il fait partie du paysage, là où il y a des pentes et de la pierre ! Restaurer ou reconstituer des murs en pierre sèche c’est prolonger cette trace mémorielle, c’est conserver les caractéristiques régionales du paysage, faisant partie de leur attractivité touristique.

C’est aussi favoriser une réalisation et une production locales : faire venir des pierres de loin, coûte franchement trop cher, et les entreprises maîtrisant les techniques interviennent à une échelle territoriale restreinte. Les murs en pierre sèche, c’est donc un circuit court – et souvent très très court, car les pierres sont en partie déjà là !

Une véritable allégorie de l’économie circulaire

Il suffit d’avoir participé à un chantier de réfection d’anciens murs effondrés pour en comprendre tout le sens ! Un mur est construit, il finit par tomber, les éléments sont récupérés, triés, le mur est reconstruit. Entre les deux : 400 années, des outils simples, un peu d’énergie musculaire et surtout le savoir-faire.

Alors du point de vue de son bilan carbone, le mur en pierre sèche est potentiellement le champion toutes catégories des murs de soutènement !

Enfin la pierre sèche est l’alliée de la biodiversité ! Le mur est un habitat à part entière pour des insectes et petits animaux qui profitent de ses anfractuosités et bien sûr pour une riche flore de rocaille.

D’autres usages pour la pierre sèche ?

Le mur en pierre sèche est particulièrement adapté aux constructions ou à la réfection des murs de soutènement de terrasses agricoles, de routes et chemins, mais peut-il servir à autre chose ?

Le traitement des sols (pavage, calades…), des limites et clôtures, constituent une composante capitale de la perception paysagère. De ce point de vue, si les pierres du cru s’y prêtent, la construction de calades, clôtures et enclos, ainsi que de cabanes est intéressante : le CAUE compétent pour votre commune pourra vous en confirmer la pertinence.

Bien mise en œuvre, la pierre est un atout paysager qui reste abordable, mais pour des ouvrages d’échelle modeste. La pierre sèche n’a de fait que rarement été utilisée pour des constructions d’ampleur significative.

Utilisera-t-on la pierre sèche en architecture ?

La pierre sèche ne constitue pas, en soi, de parois étanches, elle est massive. L’emploi du matériau à grande échelle pour des hauteurs importantes est prohibitif, surtout en dehors du champ de l’autoconstruction.

Pour autant, l’intégration ponctuelle d’éléments ou de murs en pierre sèche à une architecture reste envisageable pour son aspect ou pour son inertie : architectes ! à vos crayons !

La pierre sèche est une technique particulièrement adaptée et performante pour la construction de murs de soutènement. Elle présente un véritable potentiel à l’échelle du paysage et des espaces, notamment pour le traitement des limites et des sols.

La pierre sèche est une technique oubliée mais dont les nombreux avantages nous font dire qu’elle répond à des préoccupations très actuelles et qu’elle redeviendra bientôt l’amie des agriculteurs, des paysagistes ou des particuliers !

Il s’agit de techniques accessibles demandant peu de matériel, qu’il est possible d’apprendre auprès de professionnels passionnés. Alors, qu’attendons-nous pour aller faire un stage de formation ? On y rencontre des gens passionnants !

 

O.T.